Dossier: Kyäni à l'épreuve des faits 4

FAUX

Les fondateurs de Kyani ne sont pas aussi riches qu’ils le prétendent et, sans leur faire de procès d’intention, la création de kyani n’est pas motivée par la philanthropie. Voyons d’abord ce que dit Kirk Hansen, le président de la firme :

Je viens en Europe, avec mon frère Jim, mon ami et partenaire Carl. Nous sommes déjà aisément indépendants. Son entreprise dans l’agriculture, mon business dans le pétrole, nous avons suffisamment d’argent. Nous ne venons pas ici pour gagner encore plus d’argent. Nous venons ici en mission. Nous venons ici pour accomplir quelque chose qui n’a encore jamais été fait. Nous venons ici pour changer cette industrie, qui est basée sur des gens qui aident d’autres gens, mais engagée avec des personnes et des entreprises qui n’ont pas de bonnes intentions. Kyani est en train de tout changer.

Que dit ici le président de Kyani ? Il explique, en gros, que leur objectif est de révolutionner le MLM. Selon lui, le marketing de réseau est fondée sur l’entraide, des gens qui s’entraident mutuellement pour accroître leurs revenus. Mais, malheureusement, on constate que ce business est pratiqué par des gens mal intentionnés. Et donc eux, kyani, sont là pour changer tout cela. Est-ce vraiment le cas ? Revenons d’abord sur son argument : ‘Nous sommes déjà riches, nous n’avons pas besoin de plus d’argent, donc nous faisons cela pour vous aider’.

Sont-ils si riches que ça ? Supposons que ce soit le cas (nous y reviendrons).

Reconnaissons que c’est un argument percutant. Mais pourquoi est-il percutant ? Parce que Kirk Hansen s’adresse ici à des pauvres. Et la particularité d’un pauvre est qu’il ne sait pas comment pensent les riches. C’est en comprenant comment pense un riche que l’on va réaliser à quel point cet argument est mensonger et pernicieux. Car, qu’est-ce qui motive un riche en réalité ? Qu’est-ce qui le pousse à se lever le matin ? Est-ce, en soi, le contenu de son compte bancaire ? Non. Ce qui stimule le riche, ce qui est la sève de sa vie, ce n’est pas d’avoir de l’argent, mais de faire de l’argent. Voilà pourquoi on entend que les riches n’en ont jamais assez. Voilà pourquoi on constate chaque année que les inégalités se creusent, que les riches deviennent plus riches et les pauvres plus pauvres. Parce que les riches ne s’arrêtent jamais. En permanence, ils se fixent de nouveaux challenges, de nouveaux objectifs, pour accroître leur patrimoine. Pour un riche, l’argent n’est pas une destination, c’est un chemin perpétuel, c’est un mode de vie, c’est une façon de penser. Au XVIIe siècle déjà, Blaise Pascal dans ses Pensées décrivait ici cette état d’esprit :

Ce n’est pas qu’il y ait en effet du bonheur, ni qu’on s’imagine que la vraie béatitude soit d’avoir l’argent qu’on peut gagner au jeu, ou dans le lièvre qu’on court : on n’en voudrait pas s’il était offert. (…) Raison pour laquelle on aime plus la chasse que la prise.

Pascal ne parle pas ici des gens modestes, mais de ceux qui ont déjà tout. Et il explique ceci : pour oublier que, au final, ils ne sont que des mortels, ces gens ont besoin d’être constamment dans le défi, dans l’action. Voilà pourquoi ils ne voudraient pas qu’on leur donne cet argent ou cette proie, ils ont besoin d’aller les chercher par eux-mêmes. Car le but n’est pas d’avoir, mais de prendre. Le but n’est pas de recevoir, mais de conquérir. Il le résume ainsi : la chasse est plus stimulante que la prise. Voilà la manière de penser du riche : son moteur, ce n’est pas d’avoir de l’argent, mais de faire de l’argent.

Le but des fondateurs de Kyani est-il de faire de l’argent ?

Quand on regarde au-delà de la surface pour examiner ce qui se passe en profondeur, on constate que 3 principes se dégagent :

Principe 1 : Kyani ne fait aucun cadeau aux distributeurs.

Cette assertion s’appuie sur 3 observations :

A) Le site internet : Quand vous êtes un prospect de Kyani, on vous annonce qu’en devenant distributeur, kyani vous offre un site internet. Notons tout d’abord qu’il s’agit d’un site minimaliste. Un copier-coller du site officiel sur lequel le distributeur ne peut pas faire grand-chose : ni modification, ni publication de contenus. C’est un site vitrine qui permet de présenter les produits kyani et gérer les ventes. Mais surtout, il permet aux filleuls de s’inscrire via le lien de parrainage du distributeur. En réalité, le distributeur n’est officiellement pas propriétaire de ce site, mais juste « utilisateur ». C’est la raison pour laquelle beaucoup de distributeurs se créent un deuxième site internet. Mais ce site offert par kyani est-il vraiment gratuit ? Oui, mais… Mais quoi ?.. Il est gratuit si vous accédez au minimum au grade supérieur, celui de jade. Le grade qui requiert l’enrôlement de 4 filleuls. Si, au terme d’un an, vous n’avez pas atteint cet objectif, eh bien le site « gratuit » deviendra payant. Et cela, la plupart des distributeurs l’ignorent.

B) Le prix du pack de démarrage : 500 euros. Pourquoi est-ce aussi cher ? Certes, vous n’êtes pas obligés de démarrer avec le pack à 500 euros. Vous pouvez opter pour celui qui coûte 300 euros. Mais si vous privilégiez ce tarif réduit, il vous sera plus difficile d’accéder au rang de jade. Il vous faudra parrainer 5 personnes, au lieu de 4. C’est pourquoi la plupart des gens choisissent d’acheter le pack à 500 euros pour augmenter leurs chances d’atteindre le rang de jade le plus vite possible. Mais, que ce soit 500€ ou 300€ (plus les frais de port), le tarif est exorbitant si l’on tient compte du fait qu’il s’agit de produits à l’efficacité non éprouvée. On trouve en pharmacie des médicaments aux effets attestés par des tests biologiques et qui ne coûtent que quelques euros.

C) La garantie « satisfait ou remboursé » : kyani arbore cet argument marketing pour rassurer les gens et les inciter à acheter les produits : il leur assure qu’ils peuvent tester le produit pendant 30 jours et que s’ils ne sont pas satisfaits ils seront remboursés.

À ce stade, précisons quelque chose qui n’est pas toujours clair dans l’esprit de ceux qui s’intéressent à kyani :

- La garantie « satisfait ou remboursé » se rapporte uniquement aux produits et non à l’activité de distributeur. En effet, certains ont pensé que si au bout de 30 jours ils n’ont pas atteint le statut de jade, ils pourront obtenir le remboursement de leurs 500 euros. Non, cette garantie ne concerne que les produits.

- Si, au bout de 30 jours, vous dîtes ne pas être satisfaits des produits, vous pouvez en effet demander à être remboursés. Mais sachez alors :

• que ce remboursement ne sera pas intégral, contrairement à ce que sous-entendent certains de leurs sites.

Ils vous prélèveront notamment les frais de port.

• Si vous avez ouvert une des boîtes, le prix sera déduit. Si vous avez ouvert toutes les boîtes, rien ne vous sera remboursé. Ce point est quand même problématique, parce que le slogan « satisfait ou remboursé » suppose qu’on vous donne la possibilité de tester les produits et de vous faire rembourser s’ils ne vous conviennent pas. Cela suppose que vous pouvez, au moins, les consommer pendant quelques jours pour en mesurer les effets sur vous. Comment peut-on savoir si on est « satisfait » si on n’a pas pu goûter les produits ? Mais si vous le faîtes, tout ce que vous avez consommé vous sera facturé. Dans ces conditions, peut-on donc parler de « satisfait ou remboursé » ?

   

  Que dit la loi sur cette question ? C’est là que le bât blesse : elle ne dit rien. La loi du 7 juillet 1988 prévoit un droit de rétractation de 7 jours, mais de nombreuses entreprises de vente à distance proposent à leurs clients une période d’essai de 30 jours. Cette période d’essai déborde donc du cadre de la loi et constitue un argument purement marketing. Les conditions de remboursement sont donc définies par l’entreprise. Dominique Du Châtelier, chef des affaires juridiques de la FEVAD, livre l’avis suivant : « Un client peut toujours considérer, en effet, que pour savoir s’il est satisfait du produit qu’il vient d’acheter, il lui faut l’essayer ; ceci, quand bien même il s’agit d’un produit exclu du simple droit de rétractation, comme les CD ou les DVD déballés ou l’ensemble des douze boîtes de foie gras d’un coffret. »

Suite à une plainte déposée aux États-Unis par un distributeur qui n’avait pas obtenu un remboursement intégral, Kyäni a dû clarifier sa politique sur cette question. Voici la réponse de la firme :

En fait, Kyani explique ici qu’il y a une différence entre les clients et les distributeurs. Les clients peuvent être remboursés à 100 % (moins les frais de port), mais les distributeurs ne seront remboursés que jusqu’à 90 %.

Donc, on voit ici que kyani ne fait aucun cadeau, c’est tout simplement du business.

Principe 2 : les distributeurs sont régulièrement incités à donner de l’argent.

Kyani organise constamment des événements pour lesquels les distributeurs sont invités à assister. Mais leur participation a toujours un coût. Voyons trois exemples :

De quoi s’agit-il ? Il est question d’une invitation à assister au témoignage d’un coureur, membre de Kyani. Quel est le coût ?

Précisons que ces célébrations se déroulent souvent à l’étranger. Donc, le distributeur doit financer son voyage et, une fois là-bas, payer ce qui est mentionné.

Deuxième exemple, les distributeurs sont invités, à l’occasion d’une convention, à dîner avec les fondateurs de l’entreprise. Quel coût ?

Pour avoir l’honneur de partager la table du président, Kirk Hansen, c’est 1 000 euros et 500 euros pour les autres fondateurs. Franchement, est-ce que c’est normal ? Posez-vous la question suivante : si un jour vous êtes invités à l’Élysée pour manger à la table du président Hollande, combien devrez-vous payer ? 0 euro ! Il faut savoir que, chaque année des Français sont invités à l’Élysée pour partager un repas avec le président de la république. Ils peuvent être invités pour des raisons diverses : membres d’associations, entrepreneurs, jeunes issus de quartiers difficiles, etc. Mais ils n’auront jamais à débourser le moindre centime ! Est-il donc normal de payer 1 000 euros (plus le prix du voyage) pour manger à la table de Monsieur Kirk Hansen ? Même Jésus, quand les gens mangeaient avec lui, ils n’avaient pas à payer !

Évidemment, dans ces cas de figure il n’y a pas d’obligation. Ce ne sont que des invitations. Mais, si vous devenez membres de kyani, vous aurez chaque semaine des newsletters avec des invitations de ce genre. Et, même s’il n’y a pas d’obligation, on voit quand même qu’on est loin ici d’une pure initiative philanthropique. La question financière est omniprésente, kyani est clairement une société qui est là pour faire de l’argent. Et ce sont les distributeurs qui sont les premiers sollicités pour remplir les caisses de l’entreprise. Ce point est démontré avec le troisième exemple : l’action humanitaire.

Kyani, comme beaucoup d’entreprises qui soignent leur communication, a créé une fondation humanitaire : le « Kyäni Caring Hands ».

Il s’agit de distribuer des repas, des « Potato Packs », à des populations dans le besoin. Le Potato Pack est un produit alimentaire mis au point par les laboratoires kyani et chaque année une population est choisie pour en recevoir gratuitement. Évidemment, rien n’est plus noble que ce genre de programmes. Mais, qui est sollicité pour financer les potato packs qui seront distribués ? Voici la réponse :

Une fois encore, on demande aux distributeurs d’acheter les potato packs qui seront distribués, donc, en fait, de financer l’action humanitaire. Pourquoi est-ce un problème ? Parce qu’on constate que pour tout le distributeur est mis à contribution. On a vu plus haut ce que disait le président Kirk Hansen :

Nous sommes déjà aisément indépendants. Son entreprise dans l’agriculture, mon business dans le pétrole, nous avons suffisamment d’argent.

Effectivement, ils prétendent être richissimes ! Dans ce cas, ne peuvent-ils pas faire un vrai geste de générosité et payer eux-mêmes ces patato packs ? Pourquoi demander aux distributeurs, qui sont pauvres, de mettre la main au portefeuille ? En vérité, les pauvres distributeurs paient pour que les dirigeants de kyani se donnent aux yeux du monde une image de bienfaiteurs.

Principe 3 : la promotion de la société Kyani repose sur les distributeurs

Quand on est une entreprise on sait aujourd’hui que rien n’est plus important que la publicité. Surtout avec l’omniprésence d’internet et, donc, de la concurrence, sans publicité permanente une société n’est pas viable. C’est pourquoi les entreprises prévoient dans leur budget une part non négligeable dédiée à la promotion. Notamment sur Internet, cette promotion inclut la présence sur les moteurs de recherche, avec parfois de la publicité adwords. Les réseaux sociaux, les bandeaux publicitaires, les vidéos YouTube, etc. Tout cela leur coûte cher. Mais, comment ça se passe pour Kyani ? Eh bien, ça se passe bien.., puisque les distributeurs se chargent de tout ! Comment cela ? Tapez juste « Kyani » sur Google.

Sur toutes les pages de Google, vous ne trouverez presque que des sites de ce genre. Des sites qui ont été créés par les distributeurs pour promouvoir la firme Kyani.

Tapez le mot « kyani » sur YouTube.

Dans presque toutes les pages, vous trouverez des vidéos de distributeurs kyani, comme celles-ci.

Pourquoi cela ? Parce que quand vous devenez distributeur, votre objectif est de trouver des filleuls à tous prix. Et pour cela, il faut faire de la pub : vidéos, sites internet, pages Facebook, etc, pour vanter l’activité et les produits kyani. Et ce déferlement de pubs sur Internet est financé par qui ? Par les distributeurs individuellement. Ils créent des sites internet, souvent via des CMS avec options payantes, s’échinent à obtenir le meilleur positionnement sur Google, parfois en achetant de la publicité adwords :

Donc, les distributeurs ne dépensent pas seulement de l’argent en achetant les produits. Ils en dépensent aussi en cherchant les filleuls à grands renforts de publicité. Et qu’en est-il de la firme ? Eh bien, l’entreprise n’a pas à débourser le moindre centime pour se faire connaître et se promouvoir, car les distributeurs s’en chargent, à leurs frais. Et ne parlons même pas du temps et de l’énergie que ces distributeurs dépensent dans cette activité.

Les fondateurs de kyani sont-ils aussi fortunés qu'ils le prétendent?

Mais, revenons sur la fortune supposée des fondateurs de Kyäni. Dans tous les sites de Kyani, vous trouverez l’assertion selon laquelle l’entreprise kyani est solide parce qu’elle a été fondée par des familles milliardaires. Est-ce vraiment le cas ? On peut sérieusement se poser la question. Parlons du président de Kyani, Kirk Hansen. L’entreprise qu’il a fondée avant Kyani se dénomme « Hansen & Hansen LLP » et elle a officiellement été enregistrée le 12 janvier 2001. Mais, remarquez le statut juridique de cette entreprise :

« Limited Liability Partnership ». Que signifie ce statut juridique ? Qu’il s’agit d’une entreprise fragile sur le plan financier. Ce terme signifie « Société à Responsabilité Limitée ». Aux États-Unis, c’est une structure juridique qui limite la responsabilité de ses dirigeants en cas de pertes ou de dettes. C’est donc une structure particulièrement adaptée aux petites et aux moyennes entreprises. On peut donc présumer que, quand il fonde cette entreprise en 2001, seulement 4 ans avant Kyani, Kirk Hansen n’est ni millionnaire ni milliardaire. D’ailleurs, en 2015 l’entreprise Hansen & Hansen va céder à la ville de Jackson un Droit d’accès aux égouts sanitaire et drainage sur l’emplacement de l’entreprise. À combien s’est élevée cette transaction ? À… 10 dollars !

On voit ici qu’on est loin d’une entreprise multimillionnaire.

Donc, quand les dirigeants de Kyani affirment qu’ils sont déjà richissimes et qu’ils ont créé ce MLM, non pour gagner plus d’argent, mais pour donner du bonheur aux gens, on peut légitimement en douter.

Partie 5: « Kyani est une opportunité financière » : vrai ou faux ?